Bouquet

Tous les secrets se sont envolés lorsque j'ai secoué les papiers, lourd bouquet de palmes blanches dans ma main. Seules les fleurs dans leur petit vase sont restées. Elles écrivent leur ombre sur ma feuille. Le muguet parfume. La nuit me dépossède du jour. Des herbes fleurs tendres et fraîches sous la main comme du cresson d'eau. Des sensations à n'en plus finir, mais rien à raconter. Des bouquets de rivière. Le muguet m'adresse des messages caressants. Un petit bouton vert penché au bout d'un cou alangui s'est posé sur la langue violette d'une petite pensée, comme un bonbon, un petit sac rond. La pensée a ouvert grand ses oreilles au coeur jaune, aux moustaches de chat, son grand chignon grenat, elle veille sur le petit, elle le garde au creux de sa lèvre, c'est un petit ovule, une tête d'enfant. Leur fleurissement tendre et silencieux se prolonge au-delà de toute convenance. Toutes les petites coupoles blanches de muguet rassemblées, serrées autour d'eux, indiscrets, profus et tendres.
Elle a fait ce bouquet de ses mains, nous l'a offert, il exhale son parfum paradisiaque, pénétrant effrontément à travers mes mains, mon visage, mes poumons, mes pensées, il glisse à l'intérieur de mon corps comme une barque chargée de trésors. C'est ainsi qu'elle dit "je t'aime" lorsqu'elle fait des bouquets, les offre dans rien dire, s'écarte un peu, rêve à d'insolites plaisirs ou de folles aventures. Le muguet parfume, revient me caresser, les mots me viennent à la bouche. Ce sont les mots du parfum, nés de lui, d'un glissement entendu.
Lorsqu'elle m'offre un bouquet, elle plonge en caresse à travers mon visage, dans un creux de mon corps qui se déploie. Petits actes d'amour clandestin, gestes, regard, mots glissés sans y penser sont là, à profusion, comme les papillons dans la prairie d'été.

Jim